5. Faire approuver le PAP et trouver des financements

Récapitulatif

Une fois que le PAP a été conçu, testé et approuvé par la direction de la Société nationale, il faut faire en sorte que les financements soient libérés rapidement et de manière certaine dès qu’un déclencheur est atteint Pour les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, le principal mécanisme financier qui permet de financer les activités prévues dans les protocoles d’action précoce est le Mécanisme du DREF pour l’ABP, qui a été mis sur pied en mai 2018.

La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) a élargi le champ d’action de son instrument de financement global à long terme, le Disaster intervention Emergency Fund (DREF), aux actions basées sur les prévisions. Historiquement, les Sociétés nationales pouvaient demander un financement au DREF exclusivement après une catastrophe ou juste avant une catastrophe imminente. Mais le FBP a fait comprendre que des actions d’anticipation (notamment de préparation et de prépositionnement) rendues possibles par une libération automatique de fonds dès qu’une prévision indique une probabilité de catastrophe élevée permettent d’atténuer les souffrances et les pertes.

Une Société nationale peut s’être dotée d’un protocole d’action précoce solide mais ne pas disposer du financement pour l’activer lorsqu’un déclencheur est atteint. Avec le Mécanisme du DREF pour l’ABP, les Sociétés nationales bénéficient de ressources financières sûres pour mener à bien leurs actions précoces avant une catastrophe à condition que leur PAP ait été validé. Un accès à un mécanisme financier multilatéral qui garantit ces ressources permet aux SN de préparer des plans bien structurés et d’agir avec assurance et rapidement pour remplir leur rôle dans la prévention et l’atténuation des souffrances humaines avant une catastrophe.

Le présent chapitre donne des explications sur la marche à suivre pour qu’une Société nationale qui dispose d’un protocole d’action précoce finalisé puisse obtenir un financement du Mécanisme du DREF pour l’ABP, et sur les principales caractéristiques de ce mécanisme.

Il répond aux questions suivantes :

  • Quelles sont les principales caractéristiques du Mécanisme du DREF pour l’ABP ?
  • Quels sont les critères qu’un PAP doit remplir pour pouvoir prétendre à un financement du Mécanisme du DREF pour l’ABP ?
  • Comment se déroule le processus d’approbation ?
  • Quelles autres démarches entreprendre après la validation du PAP pour bénéficier d’un financement du Mécanisme du DREF pour l’ABP ?

EAP Simulation Coldwave Peru 2019

Étape 1 : contacter le bureau pays de la FICR ou le bureau pour le cluster de pays

Il faut impliquer la FICR dès le début de la phase de développement du PAP. Elle peut en effet fournir un support technique qui se décline sous plusieurs formes : une coordination avec d’autres initiatives de préparation et de renforcement de la capacité au sein du pays, des conseils fournis par des expert·e·s sectoriel·le·s, des normes et directives FICR, les enseignements tirés de précédentes activations du FBP, des interventions d’’urgence et des informations sur le plan opérationnel en vigueur pour le pays.

Par ailleurs, la FICR peut également vous fournir les modèles et formats pertinents pour les PAP qui seront soumis au Mécanisme du DREF pour l’ABP. Si vous voulez que votre PAP soit approuvé et financé par le Mécanisme du DREF pour l’ABP, ce protocole et son budget doivent impérativement respecter la structure du programme et du budget de la FICR. Vous pouvez obtenir de l’aide concernant la structure de programmation et de budgétisation de la FICR auprès du point focal de la FICR pour le financement basé sur les prévisions au niveau national ou régional, le plus souvent auprès du·de la gestionnaire régional·e des catastrophes, de l’unité Finance ou de l’unité Planification, Suivi, Évaluation et Rapportage (PSER). Nous vous recommandons d’adopter pour le budget de votre PAP la structure du modèle de la FICR afin d’éviter tout retard une fois que vous aurez soumis votre PAP pour approbation.

Ne pensez pas que ces démarches font partie de l’étape 1 du processus de soumission, il s’agit au contraire une étape qui doit intervenir beaucoup plus tôt dans le processus de mise en place d’un système de FBP. Si la FICR n’est pas impliquée à un stade précoce du développement du PAP, l’approbation du protocole d’action précoce risque de s’en trouver retardée.

Étape 2 : se familiariser avec les critères du Mécanisme du DREF pour l’ABP

Le Mécanisme du DREF pour l’ABP a été inauguré en 2018, il s’agit d’un fonds distinct au sein du DREF qui fait appel à des procédures et des modèles FBP bien particuliers. Partant, les procédures et critères d’éligibilité habituel·le·s du DREF ne s’appliquent pas aux demandes de financements FBP soumis dans le cadre d’un PAP. Les modèles et formats pour les PAP ainsi qu’une copie des procédures se trouvent ici.

Le Mécanisme du DREF pour l’ABP accordera un financement aux Sociétés nationales dont les protocoles d’action précoce sont conformes aux critères de qualité définis par la FICR. L’une des principales conditions à respecter est la suivante : le Mécanisme du DREF pour l’ABP n’est pas destiné aux événements récurrents mais aux événements extrêmes d’une magnitude qui a entraîné des impacts humanitaires catastrophiques par le passé et donc exigé une assistance humanitaire internationale.

Le Mécanisme du DREF pour l’ABP se focalise exclusivement sur le financement de l’activation d’un protocole d’action précoce et sa maintenance. Il ne libère aucun fonds pour le développement de protocoles d’action précoce ou la mise en place du système de FBP (les Sociétés nationales doivent chercher d’autres sources de financement pour couvrir ces coûts).

Chaque protocole d’action précoce porte sur un aléa, mais une Société nationale peut concevoir plusieurs PAP pour des aléas différents. À l’heure actuelle, le Mécanisme du DREF pour l’ABP accepte uniquement des PAP pour des événements hydrométéorologiques.

  • Il faut citer des données qui démontrent que la magnitude/force de l’événement qui correspond au niveau d’impact que vous avez choisi a provoqué des impacts humanitaires catastrophiques par le passé. Les actions précoces sélectionnées ont pour but de réduire l’impact humanitaire prévu sur la population.
  • Le PAP montre que l’implémentation de ces actions précoces est possible dans le délai disponible.
  • Les informations historiques sur les impacts montrent que l’événement atteint la magnitude/force sélectionnée tous les 5 ans ou moins (période de retour de 5 ans).
  • Les actions précoces ciblent au moins 1000 ménages à chaque activation.
  • Le budget maximum de 250.000 francs suisses doit se répartir comme suit :
    • Maximum 25 % pour les activités de préparation : tous les frais et services courants (ressources humaines et logistiques) jugés indispensables pour que la Société nationale soit toujours prête à activer un protocole d’action précoce dès qu’un déclencheur est atteint. Ces coûts peuvent être répartis sur toute la durée de vie du PAP.
    • Maximum 40 % pour le prépositionnement du stock : disponible si l’implémentation des actions précoces exige des fournitures qu’il est impossible de se procurer dans le délai prévu dès qu’un déclencheur est atteint. Il doit être réservé au matériel d’urgence qui peut être stocké pendant toute la durée de vie du PAP, il faut donc garantir des structures de stockage, des liaisons spéciales et des assurances adaptées. Le matériel d’urgence dont la durée de conservation est inférieure à la durée de vie du PAP (certains aliments, dispositifs médicaux, etc.) ne peut pas être payé par la partie du financement destinée au prépositionnement.
    • Financement pour l’activation dès qu’un déclencheur est atteint : ces fonds sont réservés aux activités prévues dans le cadre d’une action précoce destinée à réduire l’impact d’un événement climatique extrême. Ce financement est libéré uniquement lorsqu’un déclencheur est atteint.

Lorsqu’une catastrophe se prépare et qu’un déclencheur est atteint, la Société nationale entreprend les actions précoces qu’elle a sélectionnées et en avise la FICR au moyen du modèle de notification. La FICR libère le financement convenu à l’avance pour ces actions précoces, conformément au budget approuvé. Les processus administratifs ayant été gérés à la phase d’approbation du PAP, le financement est libéré sans délai.

Quelle est la différence entre le Mécanisme du DREF pour l’ABP et une allocation du DREF au titre d’une crise imminente ?

  • Moment de la planification
    Pour toute demande d’allocation du DREF au titre d’une crise imminente, la planification des actions se fait uniquement lorsqu’une prévision a été publiée, c’est-à-dire lorsqu’un événement extrême est déjà en approche, ce qui réduit le temps disponible pour programmer et implémenter les actions à quelques jours au mieux. Le Mécanisme du DREF pour l’ABP permet de planifier les actions précoces largement en amont de la prévision. Le PAP validé et les fonds prévus accordent à la Société nationale davantage de temps pour inclure des actions qui nécessitent des préparatifs à plus long terme et un prépositionnement de l’assistance.
  • Aperçu optimisé de la vulnérabilité
    Par ailleurs, le processus de financement basé sur les prévisions qui aboutit au PAP prévoit une analyse beaucoup plus rigoureuse des impacts historiques et de la vulnérabilité de la population, ce qui permet une intervention mieux ciblée et potentiellement plus efficace.
  • Activations
    Avec une allocation du DREF au titre d’une crise imminente, la SN doit attendre qu’un Plan d’action d’urgence soit élaboré et validé. Cette démarche peut se faire en 24 heures, mais la rédaction peut prendre plus de temps, sans aucune garantie que l’appel respecte toutes les exigences d’une approbation. Le Mécanisme du DREF pour l’ABP permet à la Société nationale d’entamer les actions précoces qui figurent dans le PAP dès qu’une prévision montre que le déclencheur a été atteint. Nul besoin de passer par un autre processus d’approbation, ce qui permet de gagner un temps précieux en vue de réduire l’impact d’une catastrophe. L’aide financière est automatiquement libérée.
Étape 3 : soumettre un PAP

À l’instar de ce qu’il se passe pour le DREF, seule une Société nationale peut demander à la FICR de financer un protocole d’action précoce, le PAP doit donc avant toute autre démarche être approuvé en interne et avoir l’accord de la direction de la Société nationale. Le processus d’acceptation peut prendre jusqu’à 30 jours à partir de l’introduction de la demande au bureau pays de la FICR ou au bureau pour le cluster de pays de la FICR (BP/BCP). Les secteurs techniques au sein du BP/BCP et du bureau régional de la FICR vérifient ensuite si le PAP est conforme aux normes des programmes de la FICR. Le budget du PAP est également examiné par le département financier de la FICR.

Au terme de cet examen régional, le protocole d’action précoce est transféré à Genève pour être soumis au Comité de validation et au cercle de lecteur·rice·s expert·e·s de la FICR (Coordination des opérations, unité Risque et vulnérabilité et autres secteurs concernés en fonction du contenu du PAP).

Si la Société nationale reçoit de l’aide d’une Société nationale partenaire (SNP), le protocole d’action précoce peut être soumis par un·e délégué·e de la SNP qui travaille avec la Société nationale du pays, mais le cas échéant, la démarche exige l’approbation/l’accord officiel·le de la direction de la Société nationale, qui est l’entité principale chargée de sa mise en œuvre.

Le Comité de validation évalue les nouveaux PAP qui sont soumis pour approbation en fonction des critères de qualité et apporte son aide dans le processus de décision relatif à l’approbation du PAP. Il garantit également la cohérence de l’ABP par rapport aux autres outils et approches de la FICR pour l’action précoce, la préparation et l’intervention, ainsi que son intégration dans ces outils et approches. Le Comité de validation se compose de membres de la FICR, du Centre du Changement climatique et de Sociétés nationales actives dans le FBP.

Étape 4 : revoir le PAP en fonction du feed-back reçu et le soumettre à nouveau

Le Comité de validation et les lecteur·rice·s expert·e·s de la FICR ont généralement des conseils à proposer pour optimiser le PAP afin qu’il respecte pleinement les critères de qualité. Les retours de la FICR et du Comité de validation sont compilés et transmis à la Société nationale, puis un appel téléphonique est organisé pour répondre aux questions et commentaires.

La Société nationale revoit le PAP, résout les problèmes soulevés et le soumet à nouveau pour approbation. Si tout est en ordre, le protocole d’action précoce est approuvé.

Ce processus prend environ 30 jours, mais ce délai peut varier en fonction du temps dont a besoin la Société nationale pour trouver des solutions aux commentaires et soumettre une nouvelle fois son PAP.

Étape 5 : recevoir l’attribution des fonds et signer l’accord juridique

Dès qu’un PAP est approuvé, le Mécanisme du DREF pour l’ABP procède à l’attribution des fonds demandés dans le budget pour ce protocole d’action précoce spécifique. Un résumé du PAP et son budget sont publiés sur la page Appels de la FICR.

Dès que l’attribution est faite, la FICR, la Société nationale et la Société nationale partenaire (le cas échéant) signent un accord de financement du projet et reçoivent les ressources destinées aux activités de préparation pour la première année ainsi que les coûts ponctuels du prépositionnement que mentionne le PAP.

Pour éviter tout retard dans la signature de l’accord de financement du projet, il faut s’accorder sur les rôles et responsabilités (ainsi que les coûts qui en découlent) de chaque partenaire à un stade précoce du processus.

Étape 6 : activer le protocole d’action précoce en s’appuyant sur des fonds libérés automatiquement

Si le système de FBP est déclenché avant la fin de la durée de vie du PAP (5 ans maximum), la Société nationale et son·sa partenaire d’implémentation peuvent compter sur la libération automatique du financement garanti pour l’activation et doivent entamer sans délai la mise en œuvre des actions précoces qui figurent dans le PAP.

Malgré l’attribution automatique de fonds dès qu’un déclencheur est atteint, il faut parfois quelques jours avant qu’un transfert standard d’argent arrive dans le pays. D’autre part, un grand nombre de PAP doivent agir dans des délais très serrés, il faut donc prendre des mesures pour que les fonds soient disponibles dès qu’ils sont nécessaires. Les modalités de décaissement varient en fonction de différents facteurs : présence de la FICR dans le pays, ressources financières propres de la Société nationale, capacité financière de la Société nationale partenaire et aide fournie par celle-ci, etc. Ces modalités ont été fixées au moment de la signature de l’accord de financement du projet pour clarifier les rôles et responsabilités de toutes les parties et garantir le décaissement des fonds au moment opportun lorsqu’une prévision déclenchante est publiée.

Si le PAP est activé et que des actions précoces ont été implémentées mais que l’événement ne se concrétise pas, la Société nationale ne doit pas renvoyer les fonds à la FICR. Le système de FBP tient compte du fait qu’il peut y avoir des cas où un déclencheur est atteint, si bien que des actions précoces sont mises en œuvre, mais où la catastrophe ne se produit finalement pas. Le Mécanisme du DREF pour l’ABP agit suivant le principe « sans regret ».

Par contre, un PAP qui prévoit un délai de plus de 3 jours doit inclure un « mécanisme d’arrêt » afin d’éviter toute action dès qu’une prévision plus récente indique que l’aléa diminue en force ou a changé de direction et qu’un événement extrême ne doit plus être redouté. Le cas échéant, les fonds qui n’ont pas été dépensés avant que le mécanisme d’arrêt soit appliqué doivent être remboursés à la FICR. L’utilisation du matériel d’urgence qui n’a pas été distribué doit faire l’objet de discussions avec la FICR.

© CRA

Étape 7 : valider (à nouveau) un protocole d’action précoce après le déclenchement d’une action précoce

Lorsqu’une Société nationale a déclenché les actions précoces basées sur les prévisions de son PAP puis évalué leur impact, elle peut soumettre un PAP actualisé pour une nouvelle validation. Ce PAP mis à jour doit intégrer les enseignements tirés lors de l’activation. La procédure est la même pour ce nouveau processus de validation, la relecture pouvant prendre jusqu’à 30 jours.

Quel est le lien entre le « Mécanisme du DREF pour l’ABP » et le DREF ?

Lorsque la magnitude de l’événement dépasse les prévisions concernant l’impact et les besoins humanitaires, l’action précoce peut être suivie par des interventions financées par une allocation du DREF ou un appel d’urgence assorti d’une allocation de démarrage du DREF. La mise en lien de ce nouveau mécanisme avec le DREF renforce les liens, le partage des données et la prise de décisions aux différentes phases d’intervention dans le cycle de gestion des catastrophes.